dimanche 28 février 2016

Giengen - Ludwigsburg: Mars 1942 revenir au camp - March 1942 back to the camp


Bien qu’ayant un travail intéressant chez Ziegler, mon père aurait aimé revenir au « camp », c'est-à-dire à Ludwigsburg, où il comptait nombre de ses camarades et où les distractions existaient, alors qu’en kommando il n’y avait rien à faire les jours de repos. Un mal de ventre persistant, que le docteur diagnostiqua comme « une légère appendicite » et le fait que les prisonniers Russes avaient été évacués, donc le camp avait été désinfecté empêchant tout risque de typhus, fut l’occasion pour mon père de revenir à son point de départ. Le médecin lui avait dit qu’en cas de persistance de son mal de ventre il le ferait rapatrier à l’infirmerie du camp de Ludwigsburg. En bon Français mon père joua là-dessus et fut rapatrié d’urgence à Ludwigsburg, où un chirurgien l’ausculta tout de suite et ne décela aucune appendicite. Il passa une semaine à se reposer à l’infirmerie avant d’intégrer le camp dans la baraque des « passagers ». Après une semaine de repos de plus, il alla voir l’officier du camp afin d’être réintégré dans celui-ci. Son but était atteint, revenir dans ce camp où se côtoyaient différentes nationalités de prisonniers et où certains de ses camarades y travaillaient depuis leur capture en 1940. C’est d’ailleurs un de ses camarades, secrétaire au bureau du commandant, qui lui trouva un travail, quelques temps plus tard, au centre de tri des colis.



Although he had an interesting job at Ziegler's, my father would have liked to return to the "camp", i.e. Ludwigsburg, where he had many of his comrades and where distractions existed, while in kommando there was nothing to do on days of rest. A persistent stomach ache, which the doctor diagnosed as "a mild appendicitis" and the fact that the Russian prisoners had been evacuated, so the camp had been disinfected to prevent any risk of typhus, was an opportunity for my father to return to his starting point. The doctor told him that if his stomachache persisted he would have him repatriated to the infirmary of the Ludwigsburg camp. In good French my father played on this and was rushed back to Ludwigsburg, where a surgeon checked him immediately and found no appendicitis. He spent a week resting in the infirmary before integrating the camp into the "passenger" barracks. After another week of rest, he went to see the camp officer to be reintegrated into the camp. His goal was achieved, to return to this camp where different nationalities of prisoners were living side by side and where some of his comrades had been working there since their capture in 1940. It was one of his comrade, a secretary in the commander's office, who found him a job some time later at the parcel sorting centre.

Entrée du Stalag VA Ludwigsburg

vendredi 26 février 2016

Giengen 1942: La collaboration - The collaboration

Parfois des journaux français étaient distribués aux prisonniers et c'était pour eux comme une bouffée d'air frais, même si les nouvelles n'étaient pas réjouissantes, mais c'était des nouvelles de France, écrites par des journalistes français. Ce sont ces petites choses qui bien souvent aidaient les prisonniers à tenir le coup. Pourtant, un jour de mars 1942, un numéro de l'Illustration circula laissant mon père dans le désarroi le plus total, et je pense qu'il ne fut pas le seul. Dans son journal intime il écrivit ceci:
"....il est une chose paradoxale pour nous prisonniers de constater qu’il existe deux sortes de Français : ceux qui combattent avec les Allemands et ceux qui sont leurs prisonniers – Nous avons eu cette semaine un N° de l’Illustration et nous avons pu y voir nos camarades Français sur le front Russe, habillés comme nos gardiens – Nous avons pu aussi y voir des officiers Français prenant leurs repas en compagnie d’officiers Allemands, alors qu’à nous il nous est interdit d’avoir aucune relation avec les civils en dehors du travail – Que peut on comprendre à tout cela ?........ Lorsqu’on pose la question « Pourquoi ne nous libère-t-on pas ? » On nous répond « Vous êtes encore nos ennemis, la paix n’est pas signée »……. Mais alors, pourquoi certains Français combattent-il aux côtés des Allemands en Russie ? Seraient-ce des traitres par hasard ? Et pourtant non puisqu’ils sont recrutés en France même, avec l’assentiment du gouvernement…….. Alors ? – On nous avait dit aussi dans le « Trait d’Union » que la libération des prisonniers dépendait de la collaboration…… Cette semaine les Anglais ont « bombardé Paris et fait plus de 800 morts parce que nous collaborons avec les Allemands………. Alors pourquoi sommes-nous ici ??... Il est comme cela bien des choses qui sont incompréhensibles pour nous car nous ne savons pas ce qui se passe exactement en dehors de nos murs..."

Sometimes French newspapers were distributed to prisoners and it was like a breath of fresh air for them, even if the news was not very good, but it was news from France, written by French journalists. It was these little things that often helped prisoners to hold on. Yet one day in March 1942, an issue of “The Illustration” circulated leaving my father in total disarray, and I think he was not the only one. In his diary he wrote this:
"....it is a paradoxical thing for us prisoners to see that there are two kinds of Frenchmen: those who fight with the Germans and those who are their prisoners - this week we had an “Illustration” Number and we could see our French comrades on the Russian front, dressed as our guards - we could also see French officers eating with German officers, while we are forbidden to have any relationship with civilians outside of work - What can we understand all this?........ When we ask the question "Why aren't we being released? "We are told "You are still our enemies, peace is not signed".......... But then, why did some Frenchmen fight alongside the Germans in Russia? Are they traitors by any chance? And yet not since they are recruited in France itself, with the consent of the government........... So? - We were also told in the "Trait d'Union" that the release of prisoners depended on collaboration......... This week the British "bombed Paris and killed more than 800 people because we collaborate with the Germans.......... Then why are we here? There are many things like that that are incomprehensible to us because we do not know exactly what is happening outside our walls..."

Giengen