lundi 21 mars 2016

Les rumeurs - The rumours

Rien n’échappe jamais aux rumeurs et dans un camp de prisonniers pourquoi en serait-il autrement ? Les prisonniers étant pour certains itinérants, partant du camp pour aller travailler en kommando, les liens physiques se défaisant laissait place au questionnement, voire aux suppositions : « où est-il ? Il est probablement….. J'ai entendu dire que....». A l’occasion du retour de certains de ses camarades du 8ème RG au camp de Ludwigsburg, mon père ayant été séparé d’eux lorsqu’il travaillait à Bissingen, puis à Giengen, eut la surprise de les entendre lui dire en guise de salut : « on était persuadé que tu avais été libéré depuis longtemps ». Bien sûr mon père fut aussi étonné qu’eux mais pour d’autres raisons. Qu’est-ce qui avait bien pu leur laisser croire cela ? Un peu plus tard, dans une lettre de ma mère, mon père apprend que des Compiégnois croyaient qu’il était revenu, demandant à celle-ci de ses nouvelles. Et mon père de lui répondre par retour du courrier: « J’ai trouvé très plaisante l’erreur de ces braves gens qui me connaissaient si mal et qui avaient cru que j’étais de retour, malheureusement il n’en était rien et je suis encore bien là… ». Les rumeurs allaient aussi bon train chez les paysans qui à différentes reprises disaient que les prisonniers Français allaient être libérés, voire remplacés par des prisonniers Russes, ce qui ne leur plaisait pas du tout. A un autre moment des rumeurs contradictoires circulaient et certains autochtones répandaient le bruit que dans quatre mois tous les prisonniers seraient libérés alors que d'autres affirmaient qu'il faudrait attendre au moins un an. Les prisonniers étaient alors ballotés entre espoir et résignation. Rumeur encore lorsqu’il fut question de supprimer les gardiens des kommandos pour les remplacer par les « hommes de confiance », mon père ne se voyant pas faire office de « garde chiourme » avec ses camarades. La rumeur provient toujours d’une information mal comprise, ou même d’une information non dite officiellement mais qui fuite, ou que certains phantasment et qu’ils propagent avec toutes les déformations survenant au fur et à mesure de cette propagation d’homme en homme. Rumeurs parfois pleines d’espoir, rumeurs parfois ajoutant de la tristesse à cet éternel compagnon du prisonnier : le cafard.


Nothing ever escapes rumours and in a prison camp why should it be otherwise? As the prisoners were for some homeless, leaving the camp to work in kommando, the physical links that were being broken gave way to questions, even suppositions: "where is he? He's probably........ I've heard that...". On the occasion of the return of some of his comrades from the 8th RG to the Ludwigsburg camp, my father having been separated from them when he worked in Bissingen, then in Giengen, was surprised to hear them say to him as a greeting: "we were convinced that you had been released long ago". Of course my father was as surprised as they were, but for other reasons. What could have led them to believe that? A little later, in a letter from my mother, my father learned that some people of Compiègne believed he had returned, asking her about him. And my father replied by return of the letter: "I found very pleasant the mistake of these brave people who knew me so badly and who had believed that I was back, unfortunately it was not so and I am still there...". Rumours were also spreading among peasants who repeatedly said that French prisoners would be released or even replaced by Russian prisoners, which they did not like at all. At another time there were contradictory rumours circulating and some indigenous people spread the rumour that in four months all prisoners would be released while others claimed that it would take at least a year. The prisoners were then tossed between hope and resignation. Rumour again when it came to removing the guards of the kommandos and replacing them with "trusted men", my father did not see himself acting as "shepherd or anything" with his comrades. The rumour always comes from misunderstood information, or even from information that is not officially said but leaks, or that some fantasy and that they propagate with all the deformations occurring as this propagation from man to man. Rumours sometimes full of hope, sometimes adding sadness to this eternal companion of the prisoner: the cockroach.

kommando stalag VA
Un kommando du Stalag VA

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